Les signes de la mort et don d’organes

Message aux membres de l’Académie Pontificale des Sciences

Pape Jean-Paul II
1 février 2005

Mesdames, Messieurs!

1. J’adresse à tous mon salut cordial, exprimant ma satisfaction pour l’oeuvre de l’Académie pontificale des Sciences, qui poursuit son traditionnel engagement d’étude et de réflexion sur les délicates questions scientifiques qui interpellent la société aujourd’hui.

L’Académie pontificale a voulu consacrer cette Session du Groupe d’étude – comme elle l’avait déjà fait à deux reprises au cours des années quatre-vingts – à un thème d’une complexité et d’une importance particulières: celui des « signes de la mort », dans le contexte de la pratique des transplantations d’organes prélevés sur des personnes décédées.

2. Vous savez que le Magistère de l’Eglise a suivi dès le début, avec constance et conscience, le développement de la pratique chirurgicale de la transplantation d’organes, visant à sauver des vies humaines d’une mort imminente et à permettre aux malades de continuer à vivre pendant plusieurs années encore.

Depuis l’époque de mon vénéré prédécesseur, Pie XII, sous le Pontificat duquel a commencé la pratique chirurgicale de la transplantation d’organes, l’Eglise a sans cesse apporté la contribution de son Magistère dans ce domaine.

D’une part, l’Eglise a encouragé le libre don des organes et, de l’autre, elle a souligné les conditions éthiques de ces dons d’organe, soulignant l’obligation de défendre la vie et la dignité du donateur et du receveur; elle a également indiqué les devoirs des spécialistes qui accomplissent cette transplantation. Il s’agit de permettre un service complexe à la vie, en conjuguant le progrès technique et la rigueur éthique, en humanisant les rapports interpersonnels et en informant correctement le public.

3. En raison du progrès constant des connaissances scientifiques expérimentales, pour tous ceux qui pratiquent la chirurgie de la transplantation se présente la nécessité de poursuivre sans cesse la recherche sur le plan technique et scientifique, afin d’assurer le meilleur succès de l’intervention et une plus longue espérance de vie du patient. Dans le même temps, un dialogue incessant avec les spécialistes des disciplines anthropologiques et éthiques s’impose, afin de garantir le respect de la vie et de la personne humaine et de fournir aux législateurs les informations nécessaires pour établir des normes rigoureuses dans ce domaine.

Dans cette perspective, vous avez voulu approfondir encore une fois, au cours d’une étude sérieuse et interdisciplinaire, le domaine particulier des « signes de mort », sur la base desquels peut être établie avec certitude morale la mort clinique d’une personne pour procéder au prélèvement d’organes à transplanter.

4. Dans le cadre de l’anthropologie chrétienne, on sait que le moment de la mort de chaque personne consiste dans la perte définitive de son unité constitutive du corps et de l’esprit. En effet, chaque être humain est vivant précisément en tant que « corpore et anima unus » (Gaudium et spes, n. 14), et il l’est tant que subsiste cette unitotalité substantielle. A la lumière de cette vérité anthropologique, il apparaît clairement, comme j’ai déjà eu l’occasion de le rappeler, que « la mort de la personne comprise dans son sens premier, est un événement qu’aucune technique scientifique ni empirique ne peut identifier directement » (Discours du 29 août 2000, n. 4).

Du point de vue clinique, toutefois, l’unique manière correcte – et également la seule possible – d’affronter le problème de la vérification de la mort d’un être humain est celle d’orienter l’attention et la recherche vers la détermination de « signes de mort » adéquats, reconnus à travers leur manifestation physique chez chaque sujet. Il s’agit évidemment d’un thème d’une importance fondamentale, au sujet duquel la position de la science, attentive et rigoureuse, doit donc être écoutée en première instance, selon ce qu’enseignait déjà Pie XII, lorsqu’il affirmait que « c’est au médecin qu’il revient de donner une définition claire et précise de la « mort » et du « moment de la mort » d’un patient qui expire dans un état d’inconscience » (Discours du 24 novembre 1957).

5. A partir des données fournies par la science, les considérations anthropologiques et la réflexion éthique ont le devoir d’intervenir en effectuant une analyse tout aussi rigoureuse, et en prêtant attention au Magistère de l’Eglise. Je désire vous assurer que votre travail est digne d’éloges, et qu’il se révélera assurément utile pour les dicastères compétents du Siège apostolique – en particulier la Congrégation pour la Doctrine de la Foi – qui ne manqueront pas d’évaluer les résultats de votre réflexion en offrant ensuite les éclaircissements nécessaires pour le bien de la communauté, en particulier celui des patients et des spécialistes qui sont appelés à placer leur professionnalisme au service de la vie.

En vous exhortant à perséverer dans cet engagement commun à poursuivre le bien véritable de l’homme, j’invoque du Seigneur d’abondants dons de lumière sur vous et sur votre recherche, en gage desquels je vous donne à tous avec affection ma Bénédiction.

image_pdfimage_print