Les sans-abri d’abord

Caritas a écrit aux autorités sanitaires pour demander la vaccination prioritaire des sans-abri qui utilisent les cantines paroissiales, les assimilant aux patients des Résidences de Santé Assistées. C’est une demande de responsabilité et de partage envers ceux qui sont considérés par certains comme le «gaspillage» de cette société individualiste dans une urgence pandémique dramatique pour tous, mais surtout pour les moins. Nous avons des maisons pour nous protéger et passer le temps d’attente, connectées au monde par le web, alors qu’elles n’ont ni ces installations ni une maison mais le ciel avec froid et chaleur, pluie et soleil. Ils n’ont pas de « relations » sauf celles de nos compagnons de voyage et de nous quand nous leur remettons une petite monnaie; nous avons un lit pour rester si infectés et malades, ils n’en ont pas; ils n’ont pas de lit, mais seulement un carton étalé sur les trottoirs des rues ou des abris de fortune; nous pouvons nous laver et prendre soin de notre hygiène, alors qu’ils ne le peuvent pas. Ils n’ont ni douches, ni savon, ni serviettes; nous avons un service de santé qui nous accueille et nous traite, ils ne sont souvent même pas inscrits dans notre système de santé, ils n’ont pas de médecin généraliste, ils n’ont pas de traitement; nous avons du travail et de la nourriture pour nous nourrir en abondance, ils n’en ont pas, ils n’ont ni travail ni nourriture; nous avons des masques et des protections individuelles, ils n’en ont pas, ils n’ont pas de masques, sinon ceux que nous avons jetés dans la rue et ensuite collectés et utilisés par eux sans se soucier du risque de contagion; nous sommes sûrs que nous serons bientôt vaccinés, ils ne le sont pas, ils n’attendent rien. Vacciner les sans-abri est donc une priorité d’équité, une attention aux «rejetés» de notre société de bien-être, une prise en charge parce qu’eux, les sans-abri, existent parce que nous avons tourné notre regard ailleurs pour ne pas prendre en charge leur fragilité , leurs peurs, leur pauvreté existentielle. Vacciner les sans-abri, c’est choisir de changer le cours de notre société civile: pas d’abord les garanties, nous les garanties, mais d’abord celles qui n’ont pas de sécurité et sont marquées par des expériences de marginalisation et de pauvreté. Une société qui met le moins en avant est une société qui choisit d’être concrètement solidaire et authentique dans l’accueil, car même les sans-abri sont des membres vivants de nos communautés, et non des «gaspillages» d’humanité à mettre au rebut et à ignorer. Nous attendons maintenant de voir quelle sera la voie à suivre par ceux qui prennent temporairement la tête des décisions stratégiques en matière de santé à ce moment, car nous sommes, dans la mesure du possible, déjà au service des moins et prêts à tous les vacciner.

Vincenzo Defilippis
Président de la FEAMC

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